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Décision n° 2022-1024 QPC du 18 novembre 2022 - Décision de renvoi Cass.

M. Chams S. [Contestation de la mise à exécution par le ministère public d’une peine d’emprisonnement ferme]
Conformité

14 septembre 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-81.829

Chambre criminelle - Formation restreinte hors RNSM/NA
N° Z 22-81.829 F-D

N° 01241

14 SEPTEMBRE 2022

ECF

RENVOI

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 14 SEPTEMBRE 2022

M. [C] [O] a présenté, par mémoire spécial reçu le 15 juin 2022, une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi formé par lui contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-1, en date du 24 janvier 2022, qui a déclaré irrecevable sa requête en incident contentieux d'exécution.

Sur le rapport de Mme Guerrini, conseiller référendaire, les observations de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de M. [C] [O], et les conclusions de M. Bougy, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 septembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Guerrini, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

1. La question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :

« Les dispositions des articles 723-16 et 710 du code de procédure pénale qui, telles qu'interprétées par la Cour de cassation, permettent au prévenu condamné à une peine d'emprisonnement d'une durée inférieure ou égale à un an et qui n'a pas encore fait l'objet d'une mesure d'aménagement ab initio de former un recours contre la décision du procureur de la République de mettre à exécution cette peine sont-elles conformes à l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen dont découle le droit à un recours juridictionnel effectif et aux articles 1er et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen dont découle le principe d'égalité devant la justice en ce qu'elles prévoient que ce recours ne peut être examiné que par le juge qui a prononcé cette peine et rend à ce titre incompétente la juridiction de jugement devant laquelle le condamné fait l'objet des poursuites qui ont motivé la décision de mise à exécution et qu'elles ne prévoient pas que ce recours soit examiné dans un délai de nature à garantir que la décision intervienne avant que la peine ne soit entièrement exécutée ? »

2. Les dispositions législatives contestées, soit l'article 710 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de l'article 11 de la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021, et l'article 723-16 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de l'article 84-II de la loi n° 2009-1346 du 24 novembre 2009, sont applicables à la procédure.

3. L'article 23-16 du code de procédure pénale a déjà été déclaré conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel n° 2004-492 DC du 2 mars 2004. Cependant, l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 23 mars 2022 (n° 21-83.549), selon lequel la mise à exécution d'une peine d'emprisonnement, par le ministère public, dans les conditions de l'article 723-16 du code de procédure pénale, peut être contestée par la voie de l'incident d'exécution prévu par l'article 710 du même code, constitue un changement des circonstances de droit.

4. La question posée présente un caractère sérieux. En effet, les dispositions contestées n'imposent aucun délai à la juridiction pour statuer sur un incident de cette nature. Il en résulte que la peine peut être entièrement exécutée à la date à laquelle la contestation est jugée. Cette situation est susceptible de porter une atteinte excessive au droit au recours juridictionnel effectif, qui résulte de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme de 1789.

5. En conséquence, il y a lieu de renvoyer la question au Conseil constitutionnel.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

RENVOIE au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze septembre deux mille vingt-deux.

ECLI : FR : CCASS : 2022 : CR01241