Décision n° 2024-306 L du 25 avril 2024
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI, le 26 mars 2024, par le Premier ministre, dans les conditions prévues au second alinéa de l’article 37 de la Constitution, d’une demande enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2024-306 L. Le Premier ministre demande au Conseil constitutionnel de se prononcer sur la nature juridique :
- du troisième alinéa du paragraphe I de l’article 6 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, du mot « fixent : » figurant au premier alinéa du paragraphe IV de cet article, des 1 ° à 6 ° de ce même paragraphe ainsi que de ses neuvième et dernier alinéas, et du dernier alinéa du paragraphe VII de ce même article ;
- des mots « tirés au sort » figurant au deuxième alinéa du paragraphe I de l’article 7 de la même loi ainsi que des quatre derniers alinéas de ce même paragraphe ;
- de l’article 13 de la même loi.
Au vu des textes suivants :
- la Constitution, notamment ses articles 34 et 37 ;
- l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment ses articles 24, 25 et 26 ;
- la loi n° 82-653 du 29 juillet 1982 portant réforme de la planification ;
- la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine ;
Et après avoir entendu le rapporteur ;
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S’EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :
- Sur les dispositions de l’article 6 de la loi du 21 février 2014 soumises à l’examen du Conseil constitutionnel :
1. Aux termes de l’article 34 de la Constitution, « La loi détermine les principes fondamentaux … de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources ».
2. L’article 6 de la loi du 21 février 2014 est relatif au régime des contrats de ville conclus entre l’État, ses établissements publics et les groupements d’intérêt public dont il est membre, d’une part, et les communes et établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre concernés, d’autre part, aux fins de mise en œuvre de la politique de la ville au sein de quartiers prioritaires.
3. Le troisième alinéa de son paragraphe I fixe les modalités de signature et d’entrée en vigueur de ces contrats ainsi que leur durée.
4. Le premier alinéa et les 1 ° à 6 ° du paragraphe IV prévoient que les contrats de ville fixent les objectifs que les signataires s’engagent à poursuivre, la nature des actions à conduire, les moyens mobilisés à cet effet, les indicateurs permettant de mesurer les résultats obtenus et la structure locale d’évaluation chargée de mesurer et d’évaluer ces résultats. Son neuvième alinéa prévoit que ces contrats intègrent les actions prévues par l’ensemble des plans, schémas ou contrats visant les quartiers prioritaires ainsi que les politiques thématiques concernées par la politique de la ville. Son dernier alinéa précise qu’ils constituent une des dimensions territoriales des contrats conclus entre l’État et les régions en application de la loi du 29 juillet 1982 mentionnée ci-dessus.
5. Le dernier alinéa du paragraphe VII prévoit que le délégué du Gouvernement, susceptible d’être nommé lorsque la nature et l’importance des difficultés rencontrées dans certains quartiers prioritaires le justifient, bénéficie, pour la mise en œuvre des actions proposées, du concours des services de l’État et de ses opérateurs, du comité de pilotage du contrat de ville et des services des collectivités territoriales signataires.
6. Les dispositions dont le déclassement est demandé, qui se bornent à déterminer certaines modalités de mise en œuvre des contrats de ville, ne mettent en cause ni les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources, ni aucun des autres principes ou règles placés par la Constitution dans le domaine de la loi. Elles ont donc un caractère réglementaire.
- Sur les dispositions de l’article 7 soumises à l’examen du Conseil constitutionnel :
7. Le paragraphe I de l’article 7 prévoit qu’un conseil citoyen est mis en place dans chaque quartier prioritaire de la politique de la ville. Selon son deuxième alinéa, il est composé notamment d’habitants « tirés au sort ». Ses sixième à huitième alinéas portent sur les conditions de fonctionnement du conseil citoyen. Son dernier alinéa renvoie à un arrêté du ministre chargé de la ville les modalités d’application de ce même article.
8. Les dispositions dont le déclassement est demandé, qui ne mettent en cause aucun des principes ou règles placés par la Constitution dans le domaine de la loi, ont un caractère réglementaire.
- Sur l’article 13 :
9. L’article 13 prévoit qu’un dispositif de veille active est mis en place par l’État et les collectivités territoriales au bénéfice de certains quartiers ne présentant pas les caractéristiques d’un quartier prioritaire de la politique de la ville et que ces quartiers peuvent faire l’objet d’un contrat de ville à la demande du président de l’établissement public de coopération intercommunale et des maires concernés.
10. Ces dispositions, qui se bornent à ouvrir une faculté de conclure des contrats de ville pour les quartiers bénéficiaires du dispositif de veille active, ne mettent en cause ni les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources, ni aucun des autres principes ou règles placés par la Constitution dans le domaine de la loi. Elles ont donc un caractère réglementaire.
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
Article 1er. - Ont un caractère règlementaire :
- le troisième alinéa du paragraphe I de l’article 6 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, le mot « fixent : » figurant au premier alinéa du paragraphe IV de cet article, les 1 ° à 6 ° de ce même paragraphe ainsi que ses neuvième et dernier alinéas, et le dernier alinéa du paragraphe VII de ce même article ;
- les mots « tirés au sort » figurant au deuxième alinéa du paragraphe I de l’article 7 de la même loi ainsi que les quatre derniers alinéas de ce même paragraphe ;
- l’article 13 de la même loi.
Article 2. - Cette décision sera notifiée au Premier ministre et publiée au Journal officiel de la République française.
Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 25 avril 2024, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mmes Corinne LUQUIENS, Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET, Michel PINAULT et François SÉNERS.
Rendu public le 25 avril 2024.
JORF n°0098 du 26 avril 2024, texte ° 91
ECLI : FR : CC : 2024 : 2024.306.L
Les abstracts
- 3. NORMES LÉGISLATIVES ET RÉGLEMENTAIRES
- 3.7. RÉPARTITION DES COMPÉTENCES PAR MATIÈRES
- 3.7.11. Libre administration des collectivités territoriales
- 3.7.11.1. Principe de libre administration des collectivités
- 3.7.11.1.2. Compétence réglementaire
3.7.11.1.2.13. Régime des contrats de ville
L’article 13 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 prévoit qu’un dispositif de veille active est mis en place par l’État et les collectivités territoriales au bénéfice de certains quartiers ne présentant pas les caractéristiques d’un quartier prioritaire de la politique de la ville et que ces quartiers peuvent faire l’objet d’un contrat de ville à la demande du président de l’établissement public de coopération intercommunale et des maires concernés. Ces dispositions, qui se bornent à ouvrir une faculté de conclure des contrats de ville pour les quartiers bénéficiaires du dispositif de veille active, ne mettent en cause ni les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources, ni aucun des autres principes ou règles placés par la Constitution dans le domaine de la loi. Elles ont donc un caractère réglementaire.