Décision

Décision n° 2022-5801 AN du 9 décembre 2022

A.N., Gironde (5e circ.), Mme Karine NOUETTE-GAULAIN
Rejet

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 29 juin 2022 d'une requête présentée par Me Clément Bourié, avocat au barreau de Bordeaux, pour Mme Karine NOUETTE-GAULAIN, candidate à l'élection qui s'est déroulée dans la 5ème circonscription du département de la Gironde, tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé dans cette circonscription les 12 et 19 juin 2022 en vue de la désignation d'un député à l'Assemblée nationale. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2022-5801 AN.

Au vu des textes suivants :

  • la Constitution, notamment son article 59 ;
  • l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
  • le code électoral ;
  • le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;

Au vu des pièces suivantes :

  • le mémoire en défense présenté par M. Grégoire de FOURNAS, député, enregistré le 13 septembre 2022 ;
  • les observations présentées pour M. Benoît SIMIAN, candidat, par Me Vincent Poudampa, avocat au barreau de Bordeaux, enregistrées le 18 septembre 2022 ;
  • le mémoire en réplique présenté pour Mme NOUETTE-GAULAIN, par Me Bourié, enregistré le 7 octobre 2022 ;
  • la décision de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques du 5 octobre 2022, approuvant le compte de campagne de M. Grégoire de FOURNAS ;
  • les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Et après avoir entendu le rapporteur ;

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

- Sur l'annulation des opérations électorales :

1. À l'appui de sa requête, Mme NOUETTE-GAULAIN soutient que M. SIMIAN se serait prévalu de son appartenance à la majorité présidentielle dans ses documents de propagande et ses supports de campagne, utilisant une charte graphique similaire et le même slogan « Ensemble ! » et développant des thèmes de campagne analogues. Elle estime que, eu égard au faible écart de voix la séparant du candidat arrivé en deuxième position au premier tour, cette manœuvre a créé une confusion dans l'esprit des électeurs et altéré la sincérité du scrutin.

2. S'il appartient au juge de l'élection de vérifier si des manœuvres ont été susceptibles de tromper les électeurs sur la réalité de l'investiture des candidats par les partis politiques, il ne lui appartient pas de vérifier la régularité de cette investiture au regard des statuts et des règles de fonctionnement des partis politiques.

3. Il résulte de l'instruction que, alors que Mme NOUETTE-GAULAIN avait seule reçu l'investiture de la nuance « Ensemble ! » dans la circonscription, M. SIMIAN, candidat éliminé au premier tour, a utilisé sur ses affiches électorales le slogan « Ensemble ! » et développé, dans sa propagande électorale, des thèmes analogues à ceux de la nuance « Ensemble ! ».

4. Toutefois, la question de l'investiture et des soutiens politiques des candidats par la nuance « Ensemble ! » a fait l'objet d'un large débat public durant toute la campagne, relayé notamment par la presse locale et nationale. M. SIMIAN, député sortant de la circonscription élu sous l'étiquette « La République en Marche » lors des opérations électorales de 2017, s'est présenté sous l'étiquette « Divers centre » après avoir quitté ce parti. Dès lors, dans les circonstances de l'espèce, et compte tenu de la connaissance que les électeurs avaient de la situation de M. SIMIAN, les faits dénoncés ne sont pas susceptibles d'avoir créé dans l'esprit des électeurs une confusion telle que les résultats du scrutin du premier tour en aient été affectés.

- Sur l'inéligibilité de M. SIMIAN :

5. Aux termes de l'article L.O. 136-3 du code électoral : « Saisi d'une contestation contre l'élection, le Conseil constitutionnel peut déclarer inéligible, pour une durée maximale de trois ans, le candidat qui a accompli des manœuvres frauduleuses ayant eu pour objet ou pour effet de porter atteinte à la sincérité du scrutin ».

6. Il ne résulte pas de l'instruction que les agissements invoqués aient été constitutifs d'une manœuvre frauduleuse ayant eu pour objet ou pour effet de porter atteinte à la sincérité du scrutin. Il n'y a donc pas lieu pour le Conseil constitutionnel de prononcer à l'égard de M. SIMIAN une inéligibilité sur le fondement de ces dispositions.

7. Il résulte de ce qui précède que la requête de Mme NOUETTE-GAULAIN doit être rejetée.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :

Article 1er. - La requête de Mme Karine NOUETTE-GAULAIN est rejetée.

Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs.

Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 8 décembre 2022, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mmes Corinne LUQUIENS, Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET, Michel PINAULT et François SÉNERS.

Rendu public le 9 décembre 2022.

JORF n°0288 du 13 décembre 2022, texte n° 105
ECLI : FR : CC : 2022 : 2022.5801.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.4. Campagne électorale - Pressions, interventions, manœuvres
  • 8.3.4.2. Manœuvres ou interventions relatives à la situation politique des candidats
  • 8.3.4.2.1. Appartenance ou " étiquette " politique

À l'appui de sa requête, Mme NOUETTE-GAULAIN soutient que M. SIMIAN se serait prévalu de son appartenance à la majorité présidentielle dans ses documents de propagande et ses supports de campagne, utilisant une charte graphique similaire et le même slogan « Ensemble ! » et développant des thèmes de campagne analogues. Elle estime que, eu égard au faible écart de voix la séparant du candidat arrivé en deuxième position au premier tour, cette manœuvre a créé une confusion dans l'esprit des électeurs et altéré la sincérité du scrutin. S'il appartient au juge de l'élection de vérifier si des manœuvres ont été susceptibles de tromper les électeurs sur la réalité de l'investiture des candidats par les partis politiques, il ne lui appartient pas de vérifier la régularité de cette investiture au regard des statuts et des règles de fonctionnement des partis politiques. Il résulte de l'instruction que, alors que Mme NOUETTE-GAULAIN avait seule reçu l'investiture de la nuance « Ensemble ! » dans la circonscription, M. SIMIAN, candidat éliminé au premier tour, a utilisé sur ses affiches électorales le slogan « Ensemble ! » et développé, dans sa propagande électorale, des thèmes analogues à ceux de la nuance « Ensemble ! ».
Toutefois, la question de l'investiture et des soutiens politiques des candidats par la nuance « Ensemble ! » a fait l'objet d'un large débat public durant toute la campagne, relayé notamment par la presse locale et nationale. M. SIMIAN, député sortant de la circonscription élu sous l'étiquette « La République en Marche » lors des opérations électorales de 2017, s'est présenté sous l'étiquette « Divers centre » après avoir quitté ce parti. Dès lors, dans les circonstances de l'espèce, et compte tenu de la connaissance que les électeurs avaient de la situation de M. SIMIAN, les faits dénoncés ne sont pas susceptibles d'avoir créé dans l'esprit des électeurs une confusion telle que les résultats du scrutin du premier tour en aient été affectés.

(2022-5801 AN, 09 décembre 2022, cons. 1, 2, 3, 4, JORF n°0288 du 13 décembre 2022, texte n° 105)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.11. Contentieux - Appréciation des faits par le Conseil constitutionnel
  • 8.3.11.3. Irrégularités donnant lieu à rectifications
  • 8.3.11.3.6. Inéligibilité en raison de manoeuvres frauduleuses

Il ne résulte pas de l'instruction que les agissements invoqués aient été constitutifs d'une manœuvre frauduleuse ayant eu pour objet ou pour effet de porter atteinte à la sincérité du scrutin. Il n'y a donc pas lieu pour le Conseil constitutionnel de prononcer à l'égard de M. SIMIAN une inéligibilité sur le fondement de ces dispositions.

(2022-5801 AN, 09 décembre 2022, cons. 5, 6, JORF n°0288 du 13 décembre 2022, texte n° 105)
À voir aussi sur le site : Version PDF de la décision.
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