Décision

Décision n° 2022-5794/5796 AN du 2 décembre 2022

A.N., Pas-de-Calais (8e circ.), M. Benoit POTTERIE et autre
Annulation

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 29 juin 2022 d'une requête présentée par M. Benoit POTTERIE, inscrit sur les listes électorales de la 8e circonscription du Pas-de-Calais, tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé dans cette circonscription les 12 et 19 juin 2022 en vue de la désignation d'un député à l'Assemblée nationale. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2022-5794 AN.
Il a également été saisi le 29 juin 2022 d'une requête tendant aux mêmes fins présentée par Mme Véronique DIERS, inscrite sur les listes électorales de la 8e circonscription du Pas-de-Calais, enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2022-5796 AN.

Au vu des textes suivants :

  • la Constitution, notamment son article 59 ;
  • l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
  • le code électoral ;
  • le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;

Au vu des pièces suivantes :

  • les mémoires en défense présentés pour M. Bertrand PETIT, député, par Me Philippe Bluteau, avocat au barreau de Paris, enregistrés les 16 septembre et 3 novembre 2022 ;
  • le mémoire en défense présenté par M. HOCQ, suppléant de M. PETIT, enregistré le 19 septembre 2022 ;
  • le mémoire en réplique présenté pour M. POTTERIE et Mme DIERS par Me Florent Segalen, avocat au barreau de Paris, enregistré le 14 octobre 2022 ;
  • la décision de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques du 13 octobre 2022 approuvant le compte de campagne de M. PETIT ;
  • les autres pièces produites et jointes aux dossiers ;

Après avoir entendu les parties et leurs conseils ;

Et après avoir entendu le rapporteur ;

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

1. Les requêtes mentionnées ci-dessus sont dirigées contre la même élection. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par une seule décision.

2. Les requérants soutiennent que M. René HOCQ, suppléant de M. PETIT qui a été élu député dans la 8e circonscription du Pas-de-Calais, à la suite des opérations électorales des 12 et 19 juin 2022, a la qualité de remplaçant d'un sénateur, et était, par suite, inéligible, en application des dispositions de l'article L.O. 134 du code électoral.

3. Aux termes de l'article L.O. 134 du code électoral : « le remplaçant d'un membre d'une assemblée parlementaire ne peut être remplaçant d'un candidat à l'Assemblée nationale ou au Sénat ».

4. L'inéligibilité instituée par l'article L.O. 134 du code électoral a pour objet d'assurer la disponibilité permanente de la personne appelée à remplacer le parlementaire dont le siège devient vacant. Elle fait ainsi obstacle à ce qu'un candidat à l'Assemblée nationale puisse choisir comme remplaçant la personne qui, en cas de vacance du siège d'un sénateur, serait immédiatement appelée à remplacer ce dernier.

5. M. HOCQ figurait sur une liste de candidats aux élections sénatoriales qui se sont déroulées dans le département du Pas-de-Calais le 24 septembre 2017, en troisième position, après M. Dominique Watrin, candidat proclamé élu et Mme Cathy Apourceau-Poly. Le 1er juillet 2018, cette dernière a remplacé M. Watrin, démissionnaire de son mandat de sénateur. En application des dispositions de l'article L.O. 320 du code électoral, M. HOCQ a acquis à cette date la qualité de remplaçant d'un sénateur au sens de l'article L.O. 134 du même code. Il ne pouvait, par suite, être remplaçant de M. PETIT.

6. Selon l'article L.O. 189 du code électoral, le Conseil constitutionnel « statue sur la régularité de l'élection tant du titulaire que du remplaçant ». Il y a lieu, en raison de l'inéligibilité de M. HOCQ, d'annuler l'élection de M. PETIT.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :

Article 1er. - Les opérations électorales qui ont eu lieu les 12 et 19 juin 2022 dans la 8e circonscription du Pas-de-Calais sont annulées.

Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs.

Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 1er décembre 2022, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mmes Corinne LUQUIENS, Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET, Michel PINAULT et François SÉNERS.

Rendu public le 2 décembre 2022.

JORF n°0282 du 6 décembre 2022, texte n° 99
ECLI : FR : CC : 2022 : 2022.5794.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.2. Candidatures
  • 8.3.2.1. Conditions d'éligibilité
  • 8.3.2.1.9. Remplaçants

L'inéligibilité instituée par l'article L.O. 134 du code électoral a pour objet d'assurer la disponibilité permanente de la personne appelée à remplacer le parlementaire dont le siège devient vacant. Elle fait ainsi obstacle à ce qu'un candidat à l'Assemblée nationale puisse choisir comme remplaçant la personne qui, en cas de vacance du siège d'un sénateur, serait immédiatement appelée à remplacer ce dernier. M. HOCQ figurait sur une liste de candidats aux élections sénatoriales qui se sont déroulées dans le département du Pas-de-Calais le 24 septembre 2017, en troisième position, après M. Dominique Watrin, candidat proclamé élu et Mme Cathy Apourceau-Poly. Le 1er juillet 2018, cette dernière a remplacé M. Watrin, démissionnaire de son mandat de sénateur. En application des dispositions de l'article L.O. 320 du code électoral, M. HOCQ a acquis à cette date la qualité de remplaçant d'un sénateur au sens de l'article L.O. 134 du même code. Il ne pouvait, par suite, être remplaçant de M. PETIT. Annulation de l'élection de M. PETIT en raison de l'inéligibilité de M. HOCQ.

(2022-5794/5796 AN, 02 décembre 2022, cons. 4, 5, JORF n°0282 du 6 décembre 2022, texte n° 99)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.11. Contentieux - Appréciation des faits par le Conseil constitutionnel
  • 8.3.11.3. Irrégularités donnant lieu à rectifications
  • 8.3.11.3.3. Annulation de l'élection
  • 8.3.11.3.3.1. Éligibilité

L'inéligibilité instituée par l'article L.O. 134 du code électoral a pour objet d'assurer la disponibilité permanente de la personne appelée à remplacer le parlementaire dont le siège devient vacant. Elle fait ainsi obstacle à ce qu'un candidat à l'Assemblée nationale puisse choisir comme remplaçant la personne qui, en cas de vacance du siège d'un sénateur, serait immédiatement appelée à remplacer ce dernier. M. HOCQ figurait sur une liste de candidats aux élections sénatoriales qui se sont déroulées dans le département du Pas-de-Calais le 24 septembre 2017, en troisième position, après M. Dominique Watrin, candidat proclamé élu et Mme Cathy Apourceau-Poly. Le 1er juillet 2018, cette dernière a remplacé M. Watrin, démissionnaire de son mandat de sénateur. En application des dispositions de l'article L.O. 320 du code électoral, M. HOCQ a acquis à cette date la qualité de remplaçant d'un sénateur au sens de l'article L.O. 134 du même code. Il ne pouvait, par suite, être remplaçant de M. PETIT. Selon l'article L.O. 189 du code électoral, le Conseil constitutionnel « statue sur la régularité de l'élection tant du titulaire que du remplaçant ». Il y a lieu, en raison de l'inéligibilité de M. HOCQ, d'annuler l'élection de M. PETIT.

(2022-5794/5796 AN, 02 décembre 2022, cons. 6, JORF n°0282 du 6 décembre 2022, texte n° 99)
À voir aussi sur le site : Communiqué de presse, Version PDF de la décision.
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