Décision n° 2022-13 LOM du 28 juillet 2022
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 16 mai 2022 par le président de la Polynésie française, dans les conditions prévues à l'article 12 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004, d'une demande enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2022-13 LOM. Le président de la Polynésie française demande au Conseil constitutionnel de constater qu'est intervenu dans une matière ressortissant à la compétence de la Polynésie française « l'article 3 de la loi n° 2019-812 du 1er août 2019 relative à la création de l'agence nationale du sport et à diverses dispositions relatives à l'organisation des jeux olympiques et paralympiques de 2024 ».
Au vu des textes suivants :
- la Constitution, notamment ses articles 74 et 74-1 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française ;
- le code du sport ;
- la loi n° 2019-812 du 1er août 2019 relative à la création de l'Agence nationale du sport et à diverses dispositions relatives à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 ;
- la loi n° 2022-296 du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France ;
Au vu des pièces suivantes :
- les observations présentées par la Première ministre, enregistrées le 9 juin 2022 ;
Et après avoir entendu le rapporteur ;
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :
1. Selon l'article 12 de la loi organique du 27 février 2004 mentionnée ci-dessus, pris en application du neuvième alinéa de l'article 74 de la Constitution : « Lorsque le Conseil constitutionnel a constaté qu'une loi promulguée postérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi organique est intervenue dans les matières ressortissant à la compétence de la Polynésie française, en tant qu'elle s'applique à cette dernière, cette loi peut être modifiée ou abrogée par l'assemblée de la Polynésie française ». Le président de la Polynésie française demande au Conseil constitutionnel de constater que l'article 3 de la loi du 1er août 2019 mentionnée ci-dessus est intervenu dans une matière relevant de la compétence de la Polynésie française en tant qu'il rend applicables à cette collectivité les articles L. 112-10 à L. 112-17 qu'il insère dans le code du sport.
- Sur le champ de la demande du président de la Polynésie française :
2. L'article 3 de la loi du 1er août 2019 insère notamment dans le code du sport les articles L. 112-10 à L. 112-17 relatifs à l'agence nationale du sport et à ses missions, et à la réglementation des activités physiques et sportives. Les dispositions des articles L. 112-12, L. 112-14 et L. 112-15 de ce code s'appliquent notamment en Polynésie française.
3. L'article L. 112-12 du code du sport, dans sa rédaction issue de la loi du 1er août 2019, prévoit :
« Dans les régions, la collectivité de Corse, les collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie, le représentant de l'État est le délégué territorial de l'agence dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État. Dans le cadre de ses missions, il veille au développement du sport pour toutes et tous dans les territoires les moins favorisés. Il peut ordonner les dépenses et mettre en œuvre les concours financiers territoriaux de l'agence ».
4. L'article L. 112-14 du même code, dans sa rédaction résultant de la loi du 2 mars 2022 mentionnée ci-dessus, prévoit :
« Dans les régions, la collectivité de Corse, les collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie, il est institué une conférence régionale du sport comprenant des représentants de l'État, des collectivités territoriales, des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de sport, du ou des centres de ressources, d'expertise et de performance sportive, du mouvement sportif et des autres personnes physiques et morales intéressées par le développement du sport, en particulier les organisations professionnelles représentatives des acteurs du monde économique et les organismes représentant les personnes en situation de handicap.
« La conférence régionale du sport, en cohérence avec les orientations nationales en matière de politique sportive définies dans le cadre de la convention d'objectifs conclue entre l'État et l'Agence nationale du sport et les plans sportifs locaux de son ressort territorial prévus à l'article L. 113-4, est chargée d'établir un projet sportif territorial tenant compte des spécificités territoriales qui a notamment pour objet :
« 1 ° Le développement du sport pour toutes et tous sur l'ensemble du territoire ;
« 2 ° Le développement du sport de haut niveau ;
« 3 ° Le développement du sport professionnel ;
« 4 ° La construction et l'entretien d'équipements sportifs structurants ;
« 5 ° La réduction des inégalités d'accès aux activités physiques et sportives ;
« 6 ° Le développement et la promotion des activités physiques et sportives destinées aux personnes en situation de handicap ;
« 7 ° La prévention de, la formation et la lutte contre toutes formes de violences et de discriminations dans le cadre des activités physiques et sportives pour toutes et tous ;
« 8 ° La promotion de l'engagement et du bénévolat dans le cadre des activités physiques et sportives ;
« 9 ° Les savoirs sportifs fondamentaux ;
« 10 ° Le sport santé ;
« 11 ° L'intégration sociale et professionnelle par le sport ;
« 12 ° La promotion de l'inclusion et le développement des activités physiques et sportives adaptées aux besoins particuliers des personnes ;
« 13 ° Le développement durable.
« Toute autre personne physique ou morale susceptible de contribuer à l'élaboration du projet sportif territorial peut participer à la conférence sous réserve de l'accord de la majorité des membres de droit.
« Le projet sportif territorial donne lieu à la conclusion de contrats pluriannuels d'orientation et de financement qui précisent les actions que les membres des conférences des financeurs du sport s'engagent à conduire ainsi que les ressources humaines et financières et les moyens matériels qui leur seront consacrés, dans la limite des budgets annuellement votés par chacun de ces membres.
« La conférence régionale du sport est consultée lors de l'élaboration du projet de convention territoriale d'exercice concerté de la compétence sport avant son adoption par la conférence territoriale de l'action publique prévue à l'article L. 1111-9-1 du code général des collectivités territoriales.
« La conférence régionale du sport élit son président en son sein.
« Un décret en Conseil d'État précise les modalités d'application du présent article.
« Au sens du présent article, les savoirs sportifs fondamentaux mentionnés au 9 ° désignent l'ensemble des connaissances, compétences et aptitudes susceptibles de permettre la pratique d'une activité physique ou sportive de manière autonome et en toute sécurité, notamment le savoir-nager et le savoir-rouler-à-vélo. Relève de la pratique du sport santé mentionné au 10 ° toute pratique d'activités physiques ou sportives qui contribuent au bien-être et à la santé physique, mentale et sociale du pratiquant, conformément à la définition de la santé retenue par l'Organisation mondiale de la santé, ainsi qu'à la prévention des maladies ».
5. L'article L. 112-15 du même code, dans sa rédaction issue de la loi du 1er août 2019, prévoit :
« Chaque conférence régionale du sport institue, dans le respect des spécificités territoriales, une ou plusieurs conférences des financeurs du sport comprenant des représentants :
« 1 ° De l'État ;
« 2 ° Selon le cas, de la région et des départements, de la collectivité de Corse, des collectivités territoriales régies par les articles 73 et 74 de la Constitution ou de la collectivité de Nouvelle-Calédonie ;
« 3 ° Des communes ;
« 4 ° Des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de sport ;
« 5 ° Selon le cas, des métropoles, de leurs éventuels établissements publics territoriaux et de la métropole de Lyon ;
« 6 ° Du ou des centres de ressources, d'expertise et de performance sportive ;
« 7 ° Des instances locales ou, à défaut, nationales du Comité national olympique et sportif français, du Comité paralympique et sportif français, des fédérations sportives agréées et des ligues professionnelles ;
« 8 ° Des représentants locaux ou, à défaut, nationaux des organisations professionnelles représentatives des acteurs du monde économique.
« Toute autre personne physique ou morale susceptible de contribuer à la mise en œuvre du projet sportif territorial peut participer à la conférence sous réserve de l'accord de la majorité des membres de droit.
« La conférence des financeurs du sport élit son président en son sein.
« Un décret en Conseil d'État précise les modalités d'application du présent article ».
6. La demande du président de l'assemblée de la Polynésie française doit donc être regardée comme portant sur les mots « et 74 » figurant à la première phrase de l'article L. 112-12, au premier alinéa de l'article L. 112-14 et au 2 ° de l'article L. 112-15 du code du sport.
- Sur la compétence de la Polynésie française :
7. L'article 13 de la loi organique du 27 février 2004 prévoit : « Les autorités de la Polynésie française sont compétentes dans toutes les matières qui ne sont pas dévolues à l'État par l'article 14 et celles qui ne sont pas dévolues aux communes en vertu des lois et règlements applicables en Polynésie française ».
8. L'article L. 112-12 du code du sport prévoit que le représentant de l'État en Polynésie française est le délégué territorial de l'agence nationale du sport, laquelle est notamment chargée d'apporter son concours aux collectivités territoriales en matière de développement de l'accès à la pratique sportive et au sport de haut niveau. Il prévoit également que, dans le cadre de ses missions, le délégué veille au développement du sport dans les territoires les moins favorisés et qu'il peut ordonner les dépenses et mettre en œuvre les concours financiers territoriaux de l'agence. Les articles L. 112-14 et L. 112-15 du même code instituent une conférence régionale du sport dans cette collectivité qui établit un projet sportif territorial et met en place une ou plusieurs conférences des financeurs du sport.
9. Ces dispositions ne se rattachent pas à l'une des matières réservées à la compétence de l'État en application de l'article 14 de la loi organique du 27 février 2004. Par conséquent, en rendant applicables ces dispositions en Polynésie française, les mots « et 74 » figurant à la première phrase de l'article L. 112-12, au premier alinéa de l'article L. 112-14 et au 2 ° de l'article L. 112-15 du code du sport relèvent d'une matière qui est de la compétence de cette collectivité.
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
Article 1er. - Relèvent d'une matière qui est de la compétence de la Polynésie française les mots « et 74 » figurant à la première phrase de l'article L. 112-12, au premier alinéa de l'article L. 112-14 et au 2 ° de l'article L. 112-15 du code du sport, en tant qu'ils rendent applicables ces articles dans cette collectivité.
Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française.
Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 28 juillet 2022, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mmes Corinne LUQUIENS, Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET, Michel PINAULT et François SÉNERS.
Rendu public le 28 juillet 2022.
JORF n°0174 du 29 juillet 2022, texte n° 92
ECLI : FR : CC : 2022 : 2022.13.LOM
Les abstracts
- 14. ORGANISATION DÉCENTRALISÉE DE LA RÉPUBLIQUE
- 14.4. ORGANISATION DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
- 14.4.6. Collectivités d'outre-mer régies par l'article 74
- 14.4.6.7. Règles particulières aux collectivités dotées de l'autonomie
- 14.4.6.7.3. Procédure de déclassement par le Conseil constitutionnel (article 74, alinéa 9)
14.4.6.7.3.1. Disposition législative dont le déclassement est demandé
Le Conseil est saisi d'une demande de déclassement portant sur l'application de certaines dispositions du code du sport en Polynésie française. La demande du président de l'assemblée de la Polynésie française doit donc être regardée comme portant sur les mots « et 74 » figurant à la première phrase de l'article L. 112-12, au premier alinéa de l'article L. 112-14 et au 2° de l'article L. 112-15 du code du sport.
- 14. ORGANISATION DÉCENTRALISÉE DE LA RÉPUBLIQUE
- 14.4. ORGANISATION DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
- 14.4.6. Collectivités d'outre-mer régies par l'article 74
- 14.4.6.7. Règles particulières aux collectivités dotées de l'autonomie
- 14.4.6.7.3. Procédure de déclassement par le Conseil constitutionnel (article 74, alinéa 9)
14.4.6.7.3.3. Matière ressortissant à la compétence de la collectivité d'outre-mer
Le Conseil est saisi d'une demande de déclassement portant sur l'application de certaines dispositions du code du sport en Polynésie française. L'article L. 112-12 du code du sport prévoit que le représentant de l'État en Polynésie française est le délégué territorial de l'agence nationale du sport, laquelle est notamment chargée d'apporter son concours aux collectivités territoriales en matière de développement de l'accès à la pratique sportive et au sport de haut niveau. Il prévoit également que, dans le cadre de ses missions, le délégué veille au développement du sport dans les territoires les moins favorisés et qu'il peut ordonner les dépenses et mettre en œuvre les concours financiers territoriaux de l'agence. Les articles L. 112-14 et L. 112-15 du même code instituent une conférence régionale du sport dans cette collectivité qui établit un projet sportif territorial et met en place une ou plusieurs conférences des financeurs du sport. Ces dispositions ne se rattachent pas à l'une des matières réservées à la compétence de l'État en application de l'article 14 de la loi organique du 27 février 2004. Par conséquent, en rendant applicables ces dispositions en Polynésie française, les mots « et 74 » figurant à la première phrase de l'article L. 112-12, au premier alinéa de l'article L. 112-14 et au 2° de l'article L. 112-15 du code du sport relèvent d'une matière qui est de la compétence de cette collectivité.