Décision

Décision n° 92-20 REF du 6 octobre 1992

Observations du Conseil constitutionnel relatives au référendum du 20 septembre 1992

Le Conseil constitutionnel, chargé, en application de l'article 60 de la Constitution, de veiller à la régularité des opérations de référendum, a été amené, lors de la consultation du 20 septembre 1992, à faire les observations suivantes :

1 En ce qui concerne la détermination des partis et groupements politiques habilites à participer à la campagne en vue du référendum :
Conformément à l'article 3, alinéa 1, du décret n° 92-772 du 6 août 1992, les partis et groupements politiques représentés, à la date de ce décret, « au sein d'un groupe parlementaire à l'Assemblée nationale ou au Sénat » ont été habilités, à leur demande, à participer à la campagne.
La notion de « représentation au sein d'un groupe parlementaire » gagnerait à être précisée afin d'éviter une multiplication excessive du nombre d'habilitations.

  1. En ce qui concerne les conditions de déroulement de la campagne à la radio et à la télévision :
    Le Conseil relève qu'une forte inégalité existe entre les sociétés nationales de programmes tenues, en application de l'article 16 de la loi du 30 septembre 1986, de diffuser des émissions officielles strictement réglementées, et les exploitants privés. N'étant pas soumis à une telle obligation, ces derniers peuvent, plus librement, dans les conditions prévues par une simple recommandation du Conseil supérieur de l'Audiovisuel, programmer des émissions beaucoup plus diversifiées.
    Il paraît donc souhaitable de mieux assurer l'équilibre entre le service public et le secteur privé dans ce domaine.

  2. En ce qui concerne l'organisation du scrutin :
    En cas de refus du maire, agissant en qualité d'agent de l'Etat, d'ouvrir un ou plusieurs bureaux de vote dans sa commune, il revient au préfet de faire usage du pouvoir de substitution qu'il tient de l'article L. 122-14 du code des communes afin de permettre le déroulement des opérations.
    Il reste que les dispositions de l'article L. 122-14 ne sont pas applicables dans les communes des départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, ainsi que le rappelle l'article L. 181-1 du code des communes.
    Une pareille exclusion ne se justifie guère depuis que la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 a restreint la possibilité pour le représentant de l'Etat dans le département de se substituer au maire, s'il y a carence de celui-ci, aux seuls cas où il intervient en tant qu'agent de l'Etat.
    Les règles de droit applicables gagneraient à être harmonisées sur l'ensemble du territoire de la République dès lors que se trouve en cause l'organisation d'une consultation nationale.
    Le principe du secret du vote, qui répond à une exigence d'ordre constitutionnel, doit être scrupuleusement respecté. Or, il ressort des rapports établis par les délégués du Conseil constitutionnel que certaines communes ne se sont pas dotées d'isoloirs satisfaisant aux exigences prescrites par les deuxième et troisième alinéas de l'article L. 62 du code électoral, applicables au dernier référendum en vertu de l'article 8 du décret n° 92-771 du 6 août 1992.
    Par ailleurs, le Conseil rappelle la nécessité que les enveloppes électorales soient conformes aux prescriptions de l'article R. 54 du code électoral aux termes desquelles les enveloppes fournies « sont opaques ».
    Le contrôle de l'identité des électeurs fait l'objet des dispositions des articles L. 62, alinéa 1 et R. 60 du code électoral. Ce dernier article, applicable uniquement aux électeurs des communes de plus de 5.000 habitants, pose en la matière des exigences très strictes.
    Les délégués du Conseil constitutionnel ont relevé à plusieurs reprises des manquements aux règles applicables en la matière en raison de la persistance d'usages locaux.
    Un semblable état de fait n'est pas satisfaisant. Il appartient au Gouvernement de reconsidérer le champ d'application de l'article R. 60 et de mener une action auprès des maires des communes concernées, préalablement au scrutin, en vue d'assurer le respect de la règle de droit.

  3. En ce qui concerne les conditions de divulgation des résultats :
    Selon l'article L. 52-2 du code électoral, tel qu'il a été rendu applicable au dernier référendum tant en métropole qu'outre-mer, aucun résultat partiel ou définitif ne peut être communiqué au public par la voie de la presse ou par tout moyen de communication audiovisuelle. Cette prohibition s'applique, en métropole, avant la fermeture du dernier bureau de vote sur le territoire métropolitain. Il en est de même pour les départements, territoires et collectivités territoriales d'outre-mer à statut particulier, avant la fermeture du dernier bureau de vote dans chacune des collectivités concernées.
    Les délégués du Conseil constitutionnel ont constaté que les résultats de la consultation en métropole avaient été portés à la connaissance des électeurs de la Polynésie au moment où ceux-ci étaient appelés à se prononcer sur la question posée au Peuple français.
    Il appartient aux pouvoirs publics d'apprécier s'il convient d'anticiper le jour et l'heure d'ouverture d'un scrutin national en Polynésie française.

  4. En ce qui concerne les travaux des commissions de recensement des votes :
    Pour le dernier référendum comme pour d'autres consultations électorales, les commissions de recensement des votes instituées dans chaque département ou territoire ont été confrontées à la situation dans laquelle le nombre des bulletins et enveloppes trouvés dans l'urne est supérieur à celui des émargements.
    Face à cette situation les commissions compétentes ont adopté des attitudes diverses. Certaines d'entre elles ont cru devoir retrancher la différence constatée du nombre de suffrages obtenus par la réponse arrivée en tête, d'autres ont réduit, dans des proportions équivalentes, le nombre de suffrages s'étant portés respectivement sur la réponse « OUI » et la réponse « NON ».
    Si ces pratiques n'ont pas eu d'incidence sur l'issue du scrutin, compte tenu du faible écart entre les bulletins et enveloppes d'une part, et les émargements, d'autre part, le Conseil constitutionnel ne peut que regretter la non-adéquation desdites pratiques aux règles du droit électoral propres à une consultation nationale.

Recueil, p. (pas de publication au recueil)
ECLI : FR : CC : 1992 : 92.20.REF

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