Communiqué

Décision n° 2014-436 QPC du 15 janvier 2015 - Communiqué de presse

Mme Roxane S. [Valeur des créances à terme pour la détermination de l'assiette des droits de mutation à titre gratuit et de l'ISF]
Non conformité partielle

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 15 octobre 2014 par la Cour de cassation d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par Mme Roxane S. Cette question était relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article 760 du code général des impôts (CGI).

Pour la détermination de l'assiette des droits de mutation à titre gratuit et de l'impôt de solidarité sur la fortune, l'article 760 du CGI prévoit des règles d'évaluation applicables aux créances à terme. Il comporte trois alinéas.

Le premier alinéa de l'article 760 du CGI pose la règle de principe suivant laquelle, pour le calcul de l'assiette de ces impositions, les créances à terme sont évaluées à leur valeur nominale et non à leur valeur estimative. Le Conseil a jugé que cette différence d'évaluation avec la règle applicable aux créances exigibles est conforme à la Constitution.

Le deuxième alinéa de l'article 760 du CGI prévoit, par dérogation au principe de l'imposition des créances à terme sur leur valeur nominale, que l'assiette de l'impôt est déterminée d'après la déclaration estimative lorsqu'à la date du fait générateur de l'impôt le débiteur « se trouve en état de faillite, de procédure de sauvegarde, de redressement ou liquidation judiciaires ou de déconfiture ». Le législateur a ainsi entendu prendre en compte l'incidence, sur la valeur des créances à terme, des difficultés que le débiteur rencontre pour s'acquitter de ses obligations. Le Conseil a jugé que ce deuxième alinéa ne méconnaît pas les principes d'égalité devant la loi et les charges publiques.

Le troisième alinéa de l'article 760 du CGI prévoit que, lorsqu'une créance à terme a été soumise à l'impôt sur une base estimative en application du deuxième alinéa de ce même article, le créancier est tenu de déclarer toute somme supplémentaire recouvrée postérieurement à l'évaluation en sus de celle-ci. Le Conseil constitutionnel a relevé que l'imposition supplémentaire qui en résulte n'est ainsi pas soumise à la condition que la créance avait été sous-évaluée à la date du fait générateur de l'impôt. En outre, le contribuable n'est pas admis à rapporter la preuve de ce que la capacité du débiteur de payer une somme excédant la valeur à laquelle la créance avait été évaluée résulte de circonstances postérieures au fait générateur de l'impôt, qu'il s'agisse d'un impôt ponctuel (les droits de mutation à titre gratuit) ou d'un impôt périodique (l'impôt de solidarité sur la fortune). Le Conseil a en conséquence jugé que le troisième alinéa de l'article 760 du CGI institue des modalités de fixation de l'assiette de l'impôt qui sont sans rapport avec l'appréciation des facultés contributives des contribuables assujettis à ces impôts. La déclaration d'inconstitutionnalité de cette disposition prend effet à compter de la publication de la décision du Conseil. Elle est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date.